La question prejudicielle en droit de l’Union européenne

La question prejudicielle permet une application uniforme du droit de l’Union européenne, dans les différents Etats membres de l’Union européenne. A ce titre, elle contribue à l’effectivité du contentieux communautaire et européen. Ainsi, la question prejudicielle permet à la CJUE de fournir une interpretation du droit de l’UE ou de statuer sur sa validité.

Le mecanisme de la question prejudicielle est un point central dans le développement du droit de l’Union européenne. Elle permet notamment d’avoir une interpretation et une application uniforme au sein de l’Union européenne (UE). Elle fonctionne notamment grace à la cooperation entre les juridictions nationales et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Ainsi, elle permet au juge de résoudre le contentieux communautaire au niveau national. Cela résulte notamment du fait que les juges nationaux sont les premiers garants de l’application et du respect du droit européen. En outre, certains domaines du droit sont plus propices au renvoi préjuciel. C’est notamment le cas, pour la fiscalité, le droit penal ou encore la propriété intellectuelle.

Qu’est-ce qu’une question prejudicielle?

La question prejudicielle constitue la question qu’un juge national d’un Etat membre de l’UE pose à la Cour de justice. Ainsi, la question prejudicielle intervient dans le cadre de la procedure de renvoi préjudiciel. Elle permet au juge de l’Etat membre d’interroger la CJUE sur l’interprétation ou la validité du droit de l’UE. Elle intervient, dans le cadre d’un litige en cours, devant une juridiction nationale. La réponse que donne le juge communautaire permettra au juge national de trancher le litige dont il est saisi. L’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) constitue le fondement juridique de la question prejudicielle. Ainsi, l’article 267 du TFUE (ex-article 234 TCE) déclare détermine les modalités de fonctionnement du renvoi préjudiciel. A ce titre, il déclare que :

« La Cour de justice de l’Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel:

a) sur l’interprétation des traités,

b) sur la validité et l’interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l’Union.

Lorsqu’une telle question est soulevée devant une juridiction d’un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.

Lorsqu’une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.

Si une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais.« 

Article 267 TFUE (ex-article 234 TCE)

Qui peut poser une question prejudicielle?

La saisine de la CJUE dans le cadre d’une question prejudicielle peut se faire par n’importe quelles juridictions nationales. A ce titre, il peut notamment s’agir d’un juridiction judiciaire, d’une juridiction administrative ou d’une juridiction constitutionnelle. Dès lors, tous les juges nationaux peuvent poser une question préjudicielle. Que ce soit en France, en Belgique, au Luxembourg, ou dans n’importe quel Etat membre de l’UE.

Comment poser une question prejudicielle?

La saisine de la Cour de justice pour une question prejudicielle se fait selon une procédure bien spécifique. Dans le cadre de la procedure de renvoi prejudiciel ; le juge national peut entendre les différentes parties concernant le contenu de la question prejudicielle qui doit ête renvoyée au juge communautaire. Cependant les observations doivent se limiter strictement au contenu des questions prejudicielles.

Cela résulte notamment de la jurisprudence Simmenthal ou la Cour de justice a déclaré que:

« Attendu toutefois que, si l’article 177 ne subordonne pas la saisine de la Cour au caractère contradictoire de la procédure au cours de laquelle le juge national formule une question préjudicielle, il peut, le cas échéant, s’avérer de l’intérêt d’une bonne justice que la question préjudicielle ne soit posée qu’à la suite d’un débat contradictoire.« 

CJCE, 28 Juin 1978, Simmenthal, affaire n°70/77

Comment se formule une question préjudicielle?

La formulation de la question prejudicielle revient au juge qui procède à la saisine de la Cour de justice. Ainsi, dans le cadre de cette saisine, le tribunal va rendre un jugement ou une décision. C’est ce jugement ou cette decision qui va saisir la CJUE à titre préjudiciel. Le jugement devra comporter un motivation succinte. Il devra notamment avoir tous les éléments qui permettent au juge communautaire de comprendre la problématique juridique de l’affaire. Ainsi, le jugement de renvoi prejudicial comportera en général, les éléments suivants:

  • l’objet du litige
  • les faits pertinents établis;
  • la législation nationale applicable;
  • le point de vue des différentes parties;
  • les motivations pour lesquelles le tribunal soumet la question à la Cour de justice;
  • le point de vue de la juridiction de renvoi concernant la question de droit de l’UE qui fait l’objet du litige;
  • la(les) question(s), dans le dispositif.
  • Enfin, la juridiction de renvoi soumet le dossier de l’affaire en même temps que le jugement de renvoi.

Quels sont les types de renvoi prejudiciel?

Il existe deux types de renvoi prejudiciel à la Cour de de justice. Ainsi, on distingue d’une part le renvoi en interpretation et d’autre part le renvoi en validité d’une norme de droit européen.

  • Dans le cadre du renvoi prejudiciel en interpretation d’une norme de droit de droit de l’Union européenne (UE) ; le juge communautaire détermine l’interprétation qui doit être donnée à un texte d’origine communautaire. Le texte faisant l’objet du renvoi prejudiciel en interpretation peut être un texte de droit primaire ou de droit dérivé du droit de l’UE. Ainsi, l’interprétation que donne la Cour de justice s’appliquera également aux autres Etats membres, et permettra ainsi d’avoir une interpretation uniforme du droit de l’Union européenne par toutes les juridictions nationales des Etats membres de l’UE. Dans le cadre du renvoi prejudiciel en interprétation, la Cour de Luxembourg limite son office seulement à l’interprétation du droit de l’UE. Dès lors, elle ne peut statuer sur des questions relatives à l’interprétation du droit interne des Etats membres. Néanmoins, la CJUE peut procéder à une reformulation des questions que lui soumet les juges nationaux.
  • Il y a egalement le renvoi prejudiciel en validité d’une norme de droit dérivé de droit de l’Union européenne. Il s’agit alors pour le juge européen d’opérer un contrôle de validité d’un acte de droit de l’Union européenne dans le cadre du renvoi prejudiciel du juge national. Lorsque la CJUE prononce l’invalidité de la norme de droit européen qui lui est soumise, alors les mesures nationales d’application de la norme européenne sont dès lors annulées. En effet, la CJUE a seulement le pouvoir de déclarer non valide les actes des institutions de l’Union européenne. Par ailleurs, elle ne peut pas déclarer non valide des dispositions du Traité servant de fondement à l’Union européenne, tel que le TFUE.

Qu’est-ce qu’une procedure préjudicielle accélérée?

Le droit de l’UE prévoit deux types de procédures préjudicielles accélérées. Ainsi, il y a d’une part une procedure simplifiée et d’autre part une procedure prejudicielle d’urgence (PPU). Ces procedures prejudicielles accélérées contribuent ainsi à l’effectivité du contentieux communautaire et européen.

La procedure simplifiée

L’article 104, alinéa 3, du Règlement de procedure de la Cour de justice prévoit une procedure simplifiée lorsque la CJUE a déjà statué sur une question prejudicielle identique, à celle que lui soumet le juge national. Cela peut également être dans le cas, ou il n’y a pas de doute sur la réponse à la question prejudicielle, même si la Cour de justice n’a pas encore statué sur la question. Cependant, même si l’on est dans une procedure d’urgence, les parties et l’avocat général doivent être entendus.

La procedure prejudicielle d’urgence (PPU)

Depuis le 1er mars 2008, il existe une procedure prejudicielle d’urgence (PPU). Ce renvoi prejudiciel s’applique dans le cadre des questions relatives à l’espace de liberté, de sécurité et de justice. Dans ce contexte, sur saisine du juge national ou à titre exceptionnel, d’office, le juge communautaire peut statuer sur une procedure prejudicielle d’urgence. Cette procedure prejudicielle d’urgence s’apparente ainsi, à une forme de référé prejudicielle. Ainsi, cette procedure prejudicielle d’urgence (PPU) s’applique pour les renvois prejudiciels qui sont relatifs aux domaines du titre V de la troisième partie du TFUE, à savoir l’espace de liberté, de sécurité et de justice. En outre, l’article 267, alinéa 4, TFUE dispose que lorsqu’il y a une question préjudicielle dans une affaire pendante devant une juridiction nationale concernant une personne détenue, la Cour statue dans les plus brefs délais.

Quels sont les effets et la portée d’un renvoi prejudiciel?

La décision que rend la Cour de justice de Luxembourg a une autorité de chose jugée. Par conséquent, elle s’impose à la juridiction nationale de renvoi. Elle a également le même effet, à l’égard des autres juridictions nationales des Etats membres de l’Union européenne. Ainsi, cela permet une application uniforme du droit de l’UE dans tous les Etats membres de l’UE ; lorsqu’ils sont confrontés à une question identique ou similaire. Cela permet d’avoir également une jurisprudence cohérente et uniforme en matière de droit européen.

Notre cabinet d’avocat spécialiste des questions de droit européen vous assiste dans votre contentieux européen. Ainsi, NICOLAS Avocat vous apporte son expertise en droit européen et garantir le renvoi prejudiciel à la Cour de justice par le juge interne. En effet, le renvoi prejudiciel nécessite que la question prejudicielle soit correctement soumise au juge national, et cela que ce soit devant le juge administratif, le juge judiciaire ou le juge constitutionnel.