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L’encadrement du droit de visite des agents de la douane

droit de visite de la douane

Par une décision la Cour de cassation apporte des précisions sur le droit de visite des agents de la douane. Il s’agit d’une décision du 13 juin 2019 de la Chambre criminelle. Elle permet de constater la frontière étroite entre le droit de visite et la retenue douanière. En effet, il y a un risque que le droit de visite de la douane n’aboutisse à une rétention douanière. Or les garanties ne sont pas les mêmes.

«  1°) alors que, si, hors le cas de flagrant délit, les agents de douanes ont la faculté, pour l’exercice de leur droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes, prévu par l’article 60 du code des douanes, de garder ces personnes le temps nécessaire aux visites et à l’établissement du procès-verbal qui les constate, c’est à la condition qu’elles ne soient pas retenues contre leur gré et qu’elles ne fassent l’objet d’aucune mesure coercitive ; qu’en se bornant, pour écarter le moyen de défense des prévenues qui faisaient valoir avoir été contraintes à rester dans les bureaux des agents verbalisateurs, à retenir que leur maintien n’a duré que le temps strictement nécessaire au contrôle, lorsque les retenues des exposantes ont duré respectivement 3 heures 30 et 4 heures, la cour d’appel a porté une atteinte disproportionnée au à la liberté individuelle et au droit à la sûreté ;« 

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

Les conditions de l’appréhension des indices lors d’un contrôle

 » 4°) alors qu’enfin, si les agents des douanes peuvent appréhender matériellement les indices recueillis dans le cadre d’un contrôle effectué en vertu de l’article 60 du code des douanes, c’est à la condition de procéder à leur inventaire immédiat et de s’abstenir de tout acte d’investigation les concernant ; « 

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

Les conditions du placement en retenue douanière

La Cour de cassation rappelle les conditions du placement en retenue douanière. En effet, le placement en retenue douanière nécessite deux conditions cumulatives. Il faut tout d’abord un flagrant délit puni d’une peine d’emprisonnement. Ensuite, il faut que la rétention douanière soit nécessaire à l’enquête douanière.

 » 1°) alors que les agents des douanes ne peuvent procéder à l’arrestation et au placement en retenue douanière d’une personne qu’en cas de flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement et lorsque cette mesure est justifiée par les nécessités de l’enquête douanière ; que l’article L. 152-4 du code monétaire et financier sanctionne la méconnaissance des obligations déclaratives de l’article L. 152-1 du même code d’une seule peine d’amende ; « 

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

L’exigence de proportionnalité du maintien des personnes concernés lors du droit de visite de la douane

La Cour de cassation précise les conditions d’exercices et de durée d’un droit de visite de la douane. De ce fait, un droit de visite ne leur attribue pas , les mêmes pouvoirs que lors d’une retenue douanière. Cette décision permet de borner le droit de visite par rapport à la retenue douanière. Ainsi, il ne saurait y avoir de droit de visite rampant. De ce fait, il ne peut y avoir d’investigation au cours d’un droit de visite.

 » Attendu qu’il résulte de ce texte que l’exercice du droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes ne peut donner lieu au maintien des personnes concernées à la disposition des agents des douanes au-delà de ce qui est strictement nécessaire à l’accomplissement de cette mesure et à l’établissement du procès-verbal qui la constate ;
Qu’ainsi, cette mesure de contrainte peut s’exercer le temps strictement nécessaire à la réalisation des opérations de visite, qui comprennent le contrôle de la marchandise, du moyen de transport ou de la personne, la consignation, dans un procès-verbal, des constatations faites et renseignements recueillis, ainsi que, le cas échéant, les saisies et la rédaction du procès-verbal afférent ;
« 

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

L’absence de pouvoir général d’audition lors d’un droit de visite de la douane

La chambre criminelle apporte des précisions sur les déclarations que peuvent recueillir les agents des douanes. Elle estime que les agents des douanes ne disposent pas un d’un pouvoir d’audition général, lors d’un droit de visite. En effet, ils ne peuvent recueillir des informations au travers d’une audition. L’audition constituerait le premier acte d’une investigation. Par conséquent, s’il ne s’agit pas d’une retenue douanière, ils ne peuvent retenir quelqu’un contre sa volonté.

« Que si, dans ce cadre, les agents de douanes peuvent recueillir des déclarations en vue de la reconnaissance des objets découverts, ils ne disposent pas d’un pouvoir général d’audition de la personne contrôlée ;
Qu’à l’issue du droit de visite, hors le cas où sont réunies les conditions permettant une retenue douanière, et sauf dispositions spécifiques, les agents des douanes ne sont pas autorisés à continuer à retenir la personne contrôlée contre son gré ;
 »

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

La mauvaise appréciation de la Cour d’appel

La Cour d’appel fait une mauvaise appréciation de la situation. En effet elle se base seulement sur la durée du droit de visite pour juger de sa légalité. Or la question portait principalement sur l’étendu du droit de visite. D’ailleurs, c’est dans ce cadre que se pose la question de la durée du droit de visite. En effet, le droit de visite permet seulement de faire des constations. Dès lors que, les agents des douanes vont au delà, on n’est plus dans le cadre d’un droit de visite.

 » Attendu que, pour écarter les moyens de nullité réitérés devant la cour d’appel, l’arrêt énonce que la durée des contrôles, opérés sur le fondement de l’article 60 du code des douanes, n’a été que de 3 heures 30 pour Mme B… et de 4 heures pour Mme K… ; qu’il retient que les prévenues n’ont pas été retenues au-delà du temps nécessaire à leurs contrôles, à savoir leur fouille et celle de leurs effets, le comptage des billets, leurs auditions, et s’agissant de Mme K…, de sa visite par un médecin compte tenu de son état de santé ; que les juges en concluent que leur maintien dans les bureaux des agents verbalisateurs, d’une durée strictement nécessaire aux constats, à l’accomplissement des formalités et à la rédaction des procès-verbaux, ne saurait être qualifié de retenue douanière de fait ;

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

L’illégalité d’un droit de visite de la douane violant le principe de proportionnalité

La Cour de cassation soumet la validité du droit de visite de la douane au respect du principe de proportionnalité.  En effet, elle estime que le stricte nécessaire doit être fait lors d'un droit de visite. Ainsi, l'absence de respect de ce strict nécessaire aboutit à une rétention douanière. Par ailleurs, les personnes contrôlées ne peuvent être retenues contre leur volonté. Cela paraît logique, au regard des droits de la défense. En effet, une personne retenue contre sa volonté doit pouvoir bénéficier des droits et garanties d'une personnes privée de sa liberté.

Qu’il résulte en effet de ses constatations et des procès-verbaux établis par les agents des douanes que, d’une part, les prévenues ont fait l’objet d’une audition formelle sur l’origine des fonds transportés, successivement par plusieurs agents, en raison de leurs déclarations contradictoires, d’autre part, l’une d’entre elles, diabétique, a, à plusieurs reprises, manifesté le souhait de rentrer chez elle, ce qui ne lui a pas été accordé ; qu’il s’en déduit que les personnes contrôlées, qui ne pouvaient légalement faire l’objet d’une rétention douanière, ont été maintenues à la disposition des agents des douanes au-delà de ce qui était strictement nécessaire à l’accomplissement des opérations de visite ;
 
D’où il suit que la cassation est encourue ;
 »

Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2019

Cette décision est très importante dans l’évolution du droit douanier. En effet, elle encadre strictement les contours du droit de visite de la douane. Le droit de visite n’offre pas de protection particulière, car elle n’a pas une finalité judiciaire. Cependant, la rétention douanière qui a une finalité judiciaire apporte des droits et garanties aux personnes placées sous ce régime.

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